mardi 10 avril 2012

Pot-Bouille - Avis

Dans Pot-Bouille (qui est résumé ici), Zola veut présenter ce qui se cache derrière la façade correcte d’un bel immeuble bourgeois. Le thème de l’apparence est omniprésent : les portes d’acajou, l’escalier chauffé. Tout est fait pour paraître « bien sous tout rapports ». Alors qu’en vérité la vie est différente : maîtresses, problèmes d’argent, lutte sans merci pour l’héritage, ménage à trois… Il y a aussi cette « jolie dame » qui est là de temps en temps et qui, a priori, vient tout simplement rendre visite à son amant dans sa garçonnière.

Ce livre m’a rappelé les romans d’apprentissage que j’avais lu quand j’étais adolescent. On y retrouve un certain nombre d’aspects : le héros vient de Province, il est ambitieux, il veut réussir par les femmes. Au premier chapitre de Pot-Bouille, on a la présentation de toutes les femmes qu’Octave va essayer de séduire : « ses idées se brouillèrent davantage, il vit passer des ombres : la petite madame Pichon, sa voisine, avec ses regards vides et clairs ; la belle madame Hédouin, correcte et sérieuse dans sa robe noire ; et les yeux ardents de madame Valérie ; et le rire gai de mademoiselle Josserand. » (chapitre 1). Cette présentation est en quelque sorte une annonce prémonitoire.

Au chapitre 6, un passage intéressant est celui où l’on découvre l’étage des bonnes. On y retrouve beaucoup d’aspect des chambres de bonnes parisiennes d’aujourd’hui : chambres petites, avec seulement un lit, cloisons très fines. Mais les bonnes de l’époque ne remontaient dans leur chambre le soir uniquement pour dormir… « Et vous savez, maintenant, dans toutes les maisons, les cloisons des chambres de bonne sont ainsi, minces comme des feuilles de papier. […] on ne peut même remuer dans son lit… Je trouve ça très incommode. »

Un peu plus tard dans le roman, lors de la mort de Vabre, Mme Duveyrier est seule avec Octave et son père, mourant. Son mari est absent, officiellement parce qu’il travaille sur « le rapport de l’affaire de la rue de Provence ». En vérité, il est chez sa maîtresse et se femme le sait très bien. Elle fait juste semblant de ne pas le savoir. Cela pourrait heurter les convenances. « - Vous savez, rue de la Cerisaie… Tous nos amis le savent. » (chapitre 10)

Un passage que j’ai trouvé très impressionnant est le début du chapitre 18. Adèle, une bonne, est tombée enceinte. Personne ne s’en est aperçu et Zola décrit son accouchement, seule, dans sa chambre de bonne. Tout est décrit avec une banalité, tout est très ordinaire… Mais, quand on lit ce passage, on souffre vraiment pour la pauvre Adèle : « Quatre heures venaient de sonner, lorsque, tout d’un coup, elle crut que son ventre crevait. Au milieu d’une douleur, il y eut une rupture, des eaux ruisselèrent, ses bas furent trempés. ». Et finalement, l’enfant est emballé dans du papier journal et abandonné dans la rue le plus simplement du monde. A peine si elle prend le temps de regarder si c’est une fille ou un garçon. « elle put sortir, […] aller poser son paquet dans le passage Choiseul dont on ouvrait les grilles, puis remonter tranquillement. ». Edifiant !