J’ai un avis mitigé sur ce livre. Mais pour commencer, voyons ce que j’ai aimé.
Il a les allusions aux évènements politiques réels qui se sont déroulés pendant cette période. Zola parle ainsi du baptême du prince impérial (14 juin 1856) avec énormément de détails : il précise que toutes les familles d’enfant nés le même jours que le prince avaient cinquante mille francs, que des médailles avaient été tirées pour commémorer l’évènement, etc… Il décrit aussi le chemin du cortège entre les Tuileries et Notre-Dame. Par contre, je n’ai pas réussi à savoir ce qu’était l’île Saint-Philippe dont Zola parle au début du chapitre 4. (Peut-être, l’île de la Cité ?)
Zola nous parle aussi des élections législatives de 1857, où tous les élus sont des candidats officiels de l’Empire, sauf les cinq députés républicains élus à Paris. « Paris n’en a pas moins nommé cinq députés de l’opposition… C’est le réveil. » (chapitre 6)
Les invitations à Compiègne sont aussi rigoureusement exactes. Des personnalités étaient invitées à séjourner quelques jours en automne au château de Compiègne en compagnie de l’Empereur et de l’Impératrice, avec organisation de chasses en forêt et grands repas.
Et évidemment, il y a l’authentique attentat manqué contre l’Empereur du 14 janvier 1858. Zola choisi de faire de l’attentat, l’évènement qui va permettre à Eugène Rougon de revenir sur le devant de la scène politique, en l’incluant dans le roman. « Le lendemain soir, trois bombes éclataient sous la voiture de l’empereur, devant l’Opéra. Une épouvantable panique s’emparait de la foule entassée dans la rue Le Peletier. Plus de cinquante personnes étaient frappées. ». (chapitre 8). Cet attentat a été commis par un révolutionnaire italien et Zola fait effectivement à des italiens. « Ils parlaient dans un jargon à eux, que je ne comprenais pas d’abord. Mais, à certains mots, j’ai reconnu de l’italien. Tu sais, j’ai voyagé en Italie, pour les pâtes. Alors, je me suis appliqué, et j’ai compris, mon bon… Ce sont des messieurs qui sont venus à Paris pour assassiner l’empereur. Voilà ! » (chapitre 8).
Et puis comment ne pas apprécier le passage sur l’escapade d’Eugène Rougon à Niort, pour le premier coup de pioche d’une nouvelle voie ferrée. Un ami d’Eugène Rougon possède des hauts-fourneaux dans la région aimerait bien que la nouvelle ligne passa à proximité. Le projet a longuement été gelé lorsque Eugène Rougon n’était plus au pouvoir. Mais dès qu’il est revenu, curieusement, le décret pour la nouvelle voie ferrée était signé. A la base, il s’agit d’un abus de pouvoir scandaleux ! Mais dans le discours d’inauguration, les orateurs s’enflamment comme s’il s’agissait du plus grand projet national : « Il conta ses longs efforts, les études, les démarches qu’il avait dû faire pendant près de quatre ans, pour doter le pays d’une nouvelle voie ferrée. Maintenant, toutes les prospérités allaient pleuvoir sur le département ; les champs seraient fertilisés, les usines doubleraient leur fabrication, la vie commerciale pénétrerait jusque dans les plus humbles villages ; et il semblait, à l’entendre, que les Deux-Sèvres devenaient, sous ses mains élargies, une contrée de cocagne, avec des ruisseaux de lait et des bosquets enchantés, où des tables chargées de bonnes choses attendaient les passants. » Et sur la longueur des discours politiques : « - Messieurs, un dernier mot, dit-il après s’être essuyé les lèvres avec son mouchoir. Le dernier mot dura un quart d’heure. » On a les mêmes à notre époque !
J’ai bien aimé aussi la rivalité, présente dans tout le roman, entre Eugène Rougon et le comte de Marsy. Les deux personnes sont des adversaires politiques qui ne se font aucun cadeau. Mais pour autant, chacun respecte l’autre : « Marsy fait ses affaires, parbleu ! comme vous voulez faire les vôtres… » chapitre (2). « Marsy a très-bien conduit les élections. Vous avez tort de blâmer ses circulaires. La dernière surtout était d’une jolie force… » (chapitre 6). « Il [le compte de Marsy] retint un instant Rougon, se montra d’une politesse exquise. Toujours en lutte, opposés par leurs tempéraments, ces deux hommes forts se saluaient à l’issue de chacun de leurs duels, en adversaires d’égale science, se promettant d’éternelles revanches. Rougon avait blessé Marsy, Marsy venait de blesser Rougon, cela continuerait ainsi jusqu’à ce que l’un des deux restât sur le carreau. » (chapitre 13)
Donc, après tout ça, pourquoi ai-je un avis mitigé sur ce livre ? Je trouve que l’histoire n’est pas très crédible. Clorinde aime Eugène Rougon, mais veux être sa femme et pas sa maîtresse. Eugène Rougon aime Clorinde, mais n’en veux pas se marier avec elle mais seulement être son amant. Du coup, Eugène Rougon, comme pour lutter contre une tentation arrange un mariage entre elle et son meilleur ami. Ensuite, Clorinde couche avec tout le monde sauf avec Eugène Rougon. Elle couche même avec l’Empereur et c’est cela qui va lui permettre de se venger d’Eugène. L’Empereur aurait donc accepté la démission d’Eugène uniquement à cause de Clorinde…
Un deuxième point que je n’ai pas trouvé très crédible est le fait que l’Empereur semble être un idiot, complètement dépassé par les évènements. « L’empereur était arrivé près d’eux. Il resta là une minute, morne et hésitant. » « L’œil de l’empereur s’éteignit. Il continuait à hocher la tête. Puis, sourdement, d’une voix à peine distincte, il répéta : - Nous verrons… nous en causerons… » « Pendant qu’il parlait, l’empereur levait sur lui [Eugène Rougon] ses yeux mornes, où une lueur s’allumait. Il ne disait rien, il hochait la tête par moments. Puis, quand l’autre se tut : - Sans doute… on pourrait voir … » (chapitre 6). « L’empereur s’était remis à jouer avec le couteau à papier. » (chapitre 11). J’ai du mal à croire que l’homme qui a réussi à se faire élire Président de la République en 1848, qui a réussi un coup d’Etat, et qui en tout a dirigé la France pendant 22 ans ait aussi peu de conversation. Certes, Zola n’était pas bonapartiste.
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